Dans ” Le système de Leibniz et ses modèles mathématiques” Michel Serres montre que le monde monadique (celui de Leibniz) obéit à cinq conditions nécessaires :
1)- La densité, le plein (qu’il oppose à la vacuité). Exemple ; la biologie des emboîtement infinis est plus expressive que la technologie des automates…”Ce qui différencie une machine et un vivant, soutenait Leibniz, c’est qu’une partie de la machine est vraiment une partie tandis qu’une partie de l’organisme est encore un organisme, et même une partie de cette partie et ainsi de suite à l’infini” Ce qui veut dire qu’un organisme reste total dans ses moindres parties , une machine n’est totale que comme résultante de ses propres éléments
2)- La diversité (opposée à l’uniformité) où la physique des monades (toutes différentes) est plus réelle que celle des atomes identiques.
3)- Le changement est continu et graduel.
4)- La qualité est privilégiée; La géométrie des points de vue est plus fidèle que la géométrie métrique.
5)- la qualité est intrinsèque, L’intériorité se substitue à l’extériorité, l’agrégat, le composé est “tntimisé”. D’où la réciprocité de ces deux propositions : tout corps est animé et toute âme est incorporée, partout et toujours. (Apparition du calcul différentiel et de la notion de complexité)
Á partir des thèses de Leibniz, Gabriel Tarde, plus tard, énonce le principe de” la préexistence des possibles” ou ” Principe de la différenciation ontogènique” selon lequel “l’être particulier apparaît”. Gabriel Tarde, plus philosophe que sociologue (en l’occurrence), pose les bases d’une véritable philosophie de la différence. Il semble même ouvrir une porte à Derrida en écrivant ” La différence va différant” ! ! Pour Freud le caractère différentiel est une marque propre aux phénomènes du subconscient. Gilles Deleuze avance que”la différence et la répétition ont pris la place de l’identique et du négatif, de l’identité et de la contradiction”……..
L’épistémologie de la différence servira dès lors de moteur et de référence aux sciences mathématiques, physiques et humaines.
Á ce sujet, je ne peux que conseiller la lecture de “Ontologie de la Différence, une exploration du champ épistémologiques” de Jean Milet, aux éditions Beauchesne,(2006) ouvrage savant, certes, mais de lecture passionnante (dans les très bonnes librairies)
Heuristique & Sémiologique
Épistémologie différentielle
L’utopie comme métaphore, modélisation, simulation et stimulation de la création conceptuelle.
La métaphore, l’utopie et l’uchronie partagent la notion de transfert, de transduction.La première transporte le sens d’un mot propre à un mot figuré, les secondes un “ici-maintenant” dans un autre espace et/ou un autre temps. Cette pratique ne doit pas nous étonner, c’est celle des paraboles de la Bible ou de certaines méthodes pédagogiques. Elle exige des précautions, à cause des risques de contamination et de distorsion lors de rapprochements abusifs.
Suivant les systèmes, les nouvelles « notions» peuvent être suggérées par l’usage d’opérateurs spécifiques. Ainsi, le langage induit « naturellement» l’usage des métaphores et des fictions utopiennes qui deviennent dans le contexte linguistique des éléments essentiels de renouvellement des formes langagières, des idées qu’elles “transportent ou projettent », ou même des paradigmes qu’elles peuvent éventuellement contribuer à créer. Dans les sciences physiques, le rôle des modèles mathématiques qui sont à la base de la plupart des théories; est en quelque sorte analogue au rôle des métaphores dans la langue naturelle et de l’utopie dans la pratique sociale. Un modèle, une simulation validés dans un certain contexte, pourront être exportés et appliqués à d’autres contextes avec plus ou moins de succès. Ce qui importe, c’est de voir la dimension heuristique du déplacement, du décalage, du transfert à l’intérieur d’un système symbolique donné ou proposé, de formes conceptuelles jugées suffisamment transportables.
Les métaphores, comme les modèles, sont productive dans la mesure où sont suggérées des similarités, ébauchées des connexions, esquissées des perspectives, explicitées les limites des domaines.
C’est ainsi que les concepts se mettent à circuler, que les idées se tissent car il s’agit bien du travail élémentaire de la pensée, avant même l’acte d’intelligence qui relève du tri et de la mise en correspondance. Pour que le tri et la liaison soient possibles, il faut que les modèles aient d’abord circulé, librement. Bien entendu, cette circulation est parfois, et même souvent, abusive ou trompeuse.il y a des métaphores illicites qui égarent bien plus qu’elles n’éclairent, de même qu’il y a des modèles dont on surestime le degré de généralité, ou dont on surévalue le champ d’application.
Ce danger n’est pas si grave si on sait de quoi il retourne et qu’un système métaphorique ou utopique ne doit pas avoir pour tâche de« reproduire» le réel, ce qui serait plutôt vain. Il s’agit en fait de tenter de mieux comprendre certains aspects du réel, de ses structures, des comportements qu’il suscite et des conditions qu’il requiert. En particulier, une propriété fondamentale de ces outils doit être de favoriser l’émergence de notions nouvelles, de concepts inattendus. C’est en ce sens qu’on pourrait parler de productivité du “comme si”,”in vitro” des cornues réthoriques et des éprouvettes sémiologiques sur la paillasse du Labo de la création langagière et conceptuelle.
Les formules de Marx et de Rimbaud, « transformer le monde » et « changer la vie” » n’ont rien perdu de leur actualité. Elles relèvent de l’utopie par la tâche qu’elles assignent à l’action humaine et de la métaphore mécanique et transformatrice de cette action. Peut- on laisser le temps qui passe les dévoyer en poncif et cliché, alors que sur les pavés elles se sont ont enrichies d’expérience et d’une puissance mobilisatrice sans pareil ? Référons nous à la langue de l’utopie fouriériste qui note , “que ce transport dans l’impossible linguistique n’est pas une fuite dans l’irréel, mais bien plutôt l’instrument de révélation d’un désir qui n’avail pas encore trouvé à se nommer : en l’occurrence, la mise à égalité, dans le service passionnel, de l’homme et de la femme”.
J’ai écrit ce texte à l’occasion de la venue au CEDRATS (Lyon) du philosophe René Schérer; le 16 mai 2009.
L’ABÉCÉDAIRE commun à l’anthropologie et à la technologie.
On connaît depuis la haute antiquité les machines simples qui sont la base du langage classique de la mécanique : la roue, le levier (donc la poulie et le treuil), le plan incliné le coin et la vis..(et une seule source d’énergie, l’humaine ! ! ) A partir du XVIII ème siècle il a fallu inventer un alphabet nouveau et complet pour tout réaliser.
Un successeur de Gaspard Monge, propose en 1806, une classification des mécanismes. «J’ai fait voir que l’on parvenait à l’énumération complète des Machines élémentaires les classant en dix séries. Cette division est fondée sur cette considération, que tout mécanisme, quelque composé qu’il soit résulte de la combinaison de deux quelconques de ces quatre mouvements : circulaire continu, rectiligne continu, circulaire alternatif, rectiligne alternatif.
Tout au long du XIXe siècle, de nombreux mécaniciens poursuivent la même voie en tentant de dresser une nomenclature raisonnée de la mécanique à l’instar du travail scientifique réalisé sur la chimie ou les sciences du vivant au cours du siècle précédent. Des mécanismes de ces recherches patientes témoignent de la quête d’un langage universel; les techniques ont beaucoup évolué et, avec l’électricité les machines tendent vers l’immatériel. Informatique et télécommunications ne comportent plus d’articulations : les mécanismes sont à présent de l’ordre du logiciel, mais la transposition intellectuelle entre le monde du mécanicien et celui de l’électronicien et de l’ informaticien est très directe. elle ne relève pas simplement de la métaphore ou de l’association simpliste, la matière a changé pas l’extraordinaire combinatoire que permettent ces pièces élémentaires, ces alphabets. D’un côté, cames, engrenages, ressorts, volants, manivelles, …de l’autre, résistances, diodes, microprocesseurs, condensateurs, solénoïdes , qu’on appelle composants électroniques….programmes, routines ou ressources…La machine naît de la composition complexe de ces “caractères”, de ces “mots”, de ces “textes” par l’ingénieur et le technicien. Le régulateur de Watt transmet son information de régulation par l’informatique et non plus par des biellettes ou autres engrenages, Watt semble satisfait ! ! Comme l’était Archimède de son levier ! !
Je conseille de se rendre à la page ; “question du destin” du Percolateur qui aborde la question des ‘ÉVOLUTIONS ANTHROPOLOGIQUE ET TECHNOLOGIQUE étroitement imbriquées, voire systémiques.
L’établi
Il m’a paru intéressant, alors que notre temps pare de majuscules l’Invention et la Création, les confinant dans des laboratoires ou des lofts d”artistes, de vous proposer un extrait du livre de Robert Linhart : “L’établi” (Minuit 1978). Voici la description de l’établi de M. Demarcy, retoucheur de portières chez Citroên.
«Le plus étonnant c’est son établi.
Un engin indéfinissable fait de morceaux de ferrailles et de tiges, de supports hétéroclites, d’étaux improvisés pour caler des pièces avec des trous partout et une allure d’instabilité inquiétante. Ce n’est qu’une apparence. Jamais l’établi ne l’a trahi ni ne s’est effondré. Et quand on le regarde travailler pendant un temps assez long, on comprend que toutes les apparentes imperfections de l’établi ont leur utilité : par cette fente, il peut glisser un instrument qui servira à caler une partie cachée; par ce trou, il passera la tige d’une soudure difficile; par cet espace vide. en dessous – qui rend l’ensemble si fragile d’apparence -, il pourra faire un complément de martelage sans avoir à retourner la portière déjà calée. Cet établi bricolé: il l’a confectionné lui-même, if en connaît les ressources par coeur.»
Les ingénieurs, ceux «d’en haut» ceux qui savent, vont lui remplacer brutalement son équipement par un engin neuf conçu par le Service des Méthodes. Et R.Linhart décrit alors le désarroi profond de M. Demarcy, puis le naufrage professionnel et personnel qui en résulte.
Scriptologie ou l’écriture expressive.
Écrire et peindre, un.seul mot signifiait l’un et l’autre dans l’ancienne Égypte, et cela se conçoit, puisque les mots n’étaient pas décomposés en lettres qui soient la transcription des sons, mais représentés par des hiéroglyphes, figuratifs. Il en allait pourtant de même dans la Grèce primitive qui avait un alphabet. Nous ne savons pratiquement rien du divorce qui s’est établi entre la représentation des choses et le nom qu’elles portent. Nous ignorons comment, et nous considérons généralement cela comme un progrès, dans l’écriture c’est l’abstraction qui a vaincu,
L’interprétation du texte démotique de l’Inscription de la Pierre de Rosette par le moyen du texte grec qui l’accompagne, avait montré que les Égyptiens se servaient d’un certain nombre de caractères démotiques auxquels ils avaient attribué la faculté d’exprimer des sons, pour introduire dans leurs textes idéographiques les noms propres et les mots étrangers à la langue égyptienne. On sent facilement l’indispensable nécessité d’une telle institution dans un système d’écriture. idéographique. Les Chinois, qui se servent également d’une écriture idéographique, emploient aussi un procédé tout à-fait semblable et créé pour le même motif.
Il y a chez nous, dans notre Occident alphabétisé comme une nostalgie hiéroglyphique, ou idéographjque. Pourquoi isoler une lettre de l’alphabet, l’historier en initiale déictique ? Pourquoi ces lettres armoriées, ces quasi-idéogrammes au seuil des chapitres , ou comme titre de livre tel le “W ou le souvenir d’enfance”, de Georges Perec ? La siglaison abonde dans ce sens. Il y a, dans le sigle, comme un “trait”. Grâce à son économie graphique, il se trace rapidement, pointe, désigne, marque et souligne. On le graffite, on le tague ou on le dessine d’une main appliquée et précieuse. Grâce à son économie phonique qui ne garde que le saillant des initiales on l’épèle en scansion d’éléments caractéristiques, de traits distinctifs. Grâce à son ambiguïté il peut devenir logo, sarcasme, trait d’esprit. Epigramme.
Appelons scriptologie cette approche de l’écriture alphabétique qui peut servir, en même temps, à des fins pratiques et – dans des arrangements particuliers, émouvants – esthétiques Cette nouvelle écriture, hypergraphique, selon Isidore Isou et le Lettrisme, va également dépasser les emplois utilitaires de la simple notation, pour se constituer, dans des buts exclusifs de recherche esthétique, en éléments inédits d’ ensembles esthétiques visuels. Envisagée sous l’angle formel, l’hypergraphie est l’art basé sur l’organisation de l’ensemble des signes phonétiques (non-conceptuels), lexicaux, idéographiques, acquis ou possibles, existants ou inventés.
Nous avons dans le Percolateur étudié le statut de l’arobase (@ ),l’anté-premiére lettre et de l’esperluette ( & ) la vingt-septième lettre (! ) de notre alphabet et leur relation avec les systèmes idéographique et hiéroglyphique. Nous devrions nous intéresser au X , la 24ème lettre de notre alphabet qui me paraît la plus emblématique du caractère idéographique que nous attribuons à certaines de nos lettres.
Du Phénicien en passant par le Grec, l’Étrusque, au Latin ( où l’on sait son rôle décisif dans l’inscription numérale) le X a conservé sa forme cruciale qui en facilite la lecture et le distingue des “bâtons et des ronds”, piétailles scripturaires ! ! Le X c’est le symbole de l’inconnue en algèbre, qui se généralise par métaphore à l’anonymat et à la rature, le X pointe en l’absence de signature, c’est la coordonnée principale du système cartésien celle des abscisses, le signe de la multiplication et de la pornographie, c’est le nom d’un fameux rayon ! ….Il est un champ sémantique important où le X joue à l’intérieur d’un mot le son rôle idéographique d’évocation de la rencontre, de l’intersection, du carrefour, de la croisée, de la composition… à travers des radicaux text,,, sex, .plex….nex….mix…dext….
La richesse de la question n’est évidemment pas épuisée, la notion d‘écriture expressive, la scriptologie intéressent le Percolateur et tous les passionnés de la recherche et de l’invention.
N.B. On peut souligner ici l’usage important (parfois excessif, souvent talentueux) de la scriptologie, du lettrisme, de l’écriture expressive par les “créatifs” de la communication commerciale : marque, logo, slogan, … Notons aussi que l’outil numérique est naturellement approprié à la “scriptologie” par ses qualités intersectorielles et co-opératives.
Eureka ou le percolateuristique
La littérature autobiographique ou simplement biographique décrit souvent cet instant aussi inattendu que solennel où, pour un écrivain, tout a “basculé”. Des scènes de ce genre sont également présentes dans la littérature de fiction, mais le respect de l’archétype initial, laisse alors penser que l’écrivain puise certainement dans son expérience personnelle. En effet, qu’il s’agisse d’une crise de mysticisme, d’une inspiration littéraire ou philosophique soudaine, les situations décrites et les modes d’expression sont fréquemment les mêmes et l’on pourrait peut-être tracer les grandes lignes de cette expérience personnelle bouleversante :
–Une disposition mentale, voire physique, souvent particulière (fatigue, moment de doute ou de renoncement, de crise personnelle).
–Un cadre, des circonstances nécessaires (la nuit… ou la chaleur et le soleil accablants ; souvent un détail anodin, un objet, sert d’élément déclencheur).
–Une expression littéraire particulière : lexique de l’enthousiasme ; champ lexical de la lumière, du feu ; hyperboles nombreuses ; registre lyrique etc. Toutes les ressources stylistiques sont mises au service d’une expression paroxystique : comment exprimer l’indicible ?
On peut rappeler pour illustrer ce phénomène quelques exemples
Saint Paul et son “chemin de Damas” :Actes des apôtres, Un texte fondateur…*
Blaise Pascal, La nuit de feu.23 24 Novembre 1654
*René Descartes : la soirée du 10 novembre 1619 –.
*Rousseau, Les Confessions, récit de son “Illumination deVincennes”.
*G. Flaubert, L’Éducation sentimentale, : F. Moreau découvre sa vocation.
*Mallarmé,doit se ressaisir radicalement et “chanter en désespéré “Ce ressaisissement, c’est au plus profond de la « nuit d’Idumée » qu’il va l’opérer, c’est-à-dire dans les nuits glacées de Tournon où il travaille à la genèse d’Hérodiade, à partir de l’automne 1864.
*Nietzsche prétend « casser en deux l’histoire du monde », un écrivain majeur est celui qui porte en lui « l’exigence d’une absolue césure »; il convient que celle-ci se marque dans le récit qu’il fait de sa propre vie….
*Valéry, :dans la nuit du 4 au 5 octobre 1892, au cours d’un violent orage, se retrouva au sein d’une crise existentielle. Cette dernière – connue sous le nom ‘nuit de Gênes’ – lui fit une telle impression , qu’il changea totalement de cap en matière d’écriture: il arrêta d’écrire des poèmes. Aux alentours de 1898, il suspendit même presque toutes ses activités d’écrivain – peut-être à cause du décès de Mallarmé, qui était son maître et son modèle. Pendant près de vingt ans, Valéry ne publia pas un seul mot….
*Proust, Du côté de chez Swann : La petite madeleine, évidemment....! !
*Péguy, Jérimadeh”, la découverte d’une rime géniale…
*Claudel, La nuit de Noël 1886 et sa fulgurante conversion.
*Sartre, La Nausée : la découverte de « l’existant » grâce à la racine d’un marronnier :
“J’étais tout à l’heure au jardin public. La racine du marronnier s’enfonçait dans la terre, juste au-dessous de mon banc. Je ne me rappelais plus que c’était une racine. Les mots s’étaient évanouis et, avec eux, la signification des choses, leurs modes d’emploi, les faibles repères que les hommes ont tracés à leur surface. J’étais assis, un peu voûté, la tête basse, seul en face de cette masse noire et noueuse, entièrement brute et qui me faisait peur. Et puis j’ai eu cette illumination.
Ça m’a coupé le souffle. Jamais, avant ces derniers jours, je n’avais senti ce que voulait dire « exister ». J’étais comme les autres, comme ceux qui se promènent au bord de la mer dans leurs habits de printemps. Je pensais comme eux « la mer est verte; ce point blanc, là-haut, c’est une mouette, mais je ne sentais pas que ça existait,.[…]” (La nausée)
On peut consulter sur ce site INVENTIO……. VENIRE VENTUS
Mais qui donc est Européen ?
« Je me risque ici, avec bien des réserves, avec les scrupules infinis que l’on doit avoir quand on veut préciser provisoirement ce qui n’est pas susceptible de véritable rigueur, – je me risque à vous proposer un essai de définition, …un point de vue.
« Eh bien, je considérerai comme européens tous les peuples qui ont subi au cours de l’histoire les trois influences que je vais dire.
« La première est celle de Rome. Partout où l’Empire romain a dominé, et partout où sa puissance s’est fait sentir ; et même partout où l’Empire a été l’objet de crainte, d’admiration et d’envie ; partout où le poids du glaive romain s’est fait sentir, partout où la majesté des institutions et des lois, où l’appareil et la dignité de la magistrature ont été reconnus, copiés, parfois même bizarrement singés, – là est quelque chose d’européen. Rome est le modèle éternel de la puissance organisée et stable….D’autre part la race, la langue, la qualité de vainqueur ou de vaincu, de conquis, le cèdent à une condition juridique et politique uniforme qui n’est inaccessible à personne; L’empereur peut-être un Gaulois, un Sarmate, un Syrien, et il peut sacrifier à des dieux très étrangers…
« Vint ensuite le christianisme. Vous savez comme il s’est peu à peu répandu dans l’espace même de la conquête romaine… Mais, tandis que la conquête romaine n’avait saisi que l’homme politique et n’avait régi les esprits que dans leurs habitudes extérieures, la conquête chrétienne vise et atteint progressivement le profond de la conscience….Le christianisme issu de la nation Juive s’étend de son côté aux de toute race; il leur confère par le baptême la dignité nouvelle…
« Ce que nous devons à la Grèce est peut-être ce qui nous a distingués le plus profondément du reste de l’humanité. Nous lui devons la discipline de l’Esprit . Nous lui devons une méthode de penser qui tend à rapporter toutes choses à l’homme, à l’homme complet …Il doit de développer son corps et son esprit…De cette discipline la Science devait sortir, Notre science, c’est-à-dire le produit le plus caractéristique, la gloire la plus certaine et la plus personnelle de notre esprit. L’Europe est avant tout la créatrice de la science. Il y a eu des arts de tous pays, il n’y eut de véritables sciences que d’Europe…. Je me trompe, ce n’est pas l’Europe qui l’emporte, c’est l’Esprit européen dont l’Amérique est une création formidable. »
Paul Valéry
Extraits des Essais quasi politiques, La crise de l’esprit, r
Œuvre1 Collection Bibliothèque de la Pléiade Gallimard, 1975, Paris
On peut jeter un coup d’oeil sur Pour“ l’Histoire selon HegeL
Pour en savoir plus je conseille : Le Philolog