Le Percolateur

Par numéro

 
 

Heuristique & Sémiologique

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Par dessus le Z .

Author : Gilbert — 2 May 2007

Par dessus le Z ou la place de la Lettre

Il y a une trentaine. d’années je découvrais le mot et le concept de différance avec Jacques Derrida. nous avons eu l’occasion d’en parler dans ces colonnes, je ne veux pas revenir sur le concept mais évoquer le mot. Différance est un mot qui s’auto-détinit, s’auto-désigne, s’auto-signe. Parmi la centaine de néologismes créés par Jacques Derrida il est sans doute .l’un des plus lisibles parce qu’il est conforme aux règles grammaticales de la création lexicale française; le« a » à la place du « e » rompt avec l’héritage latin mais conserve la phonétique et sa filiation avec le verbe « différer» dont il utilise le participe présent pour faire de la différance une différence mobile, dynamique, en train de se produire et non figée, statique, donnée, originaire et déterminante. (Le Grand Robert entérine le terme reconnaissant son auteur et confirmant son domaine).
Il y a six ans une jeune femme m’offrit l’un des premiers exemplaires d’un recueil de poésies qu’elle venait d’éditer à compte d’auteur. Je la connaissais et savais qu’elle avait été très malmenée (croyez-moi c’est un euphémisme) par la vie, rien ne lui avait été épargné, ni à son entourage. Le recueil était introduit par un court incipit où elle évoquait avec pudeur et retenue son existance, J’écris bien , avec un « a». J’étais catastrophé, c’est elle qui avait saisi et mis en page son texte, ce n’était ni une coquille d’imprimerie, ni une faute d’orthographe. Me souvenant de la désinence derridienne j’ai lu ce mot comme un « lapsus graphique », comme la révélation d’un refus inconscient de l’existence comme état, fatalité et de la foi en une existence à construire; je devinais derrière le mot la volonté de renaître sans oublier ce qui fut, de se conjuguer au futur, de devenir. Son doigt, sur le clavier avait dérapé du « e » au « a » par -dessus le Z, décidant de lier une existence passée à une existance possible. Le « z » n’était plus la deuxième lettre du clavier ni la dernière lettre de l’alphabet mais l’icône du chàngement de « sens ». Un signe de résilience ?
Il y a un an, lors d’une conférence à l’Ecole des Beaux Arts de Lyon, Bernard Stiegler développa entre autres l’un des thèmes fondateurs de sa philosophie: « l’homme existe moins qu’il ne consiste », puis dans Mécréance et Discrédit (Galilée) : « L’existence est entre subsistance et consistance, et seule une consistance, comme idée, peut animer un processus d’individuation, comme ce qui devient” . Je me livre, alors, à une sorte d’archéologie : l’indo-européen STA (être debout) se dérive en latin en SISTERE (mettre debout, placer) dont j’ai dénombré 8 dérivés latins qui se sont déclinés en 8 verbes français (assister, consister, désister, exister, insister, persister, résister, subsister). Tous les noms dérivés se terminent par “ance” sauf existence. De tous les critère( transitivité, morphologie, …) l’histoire du mot est la plus pertinente pour expliquer cette distinction. Seul « existence» existait en latin (exsistencia), les autres noms ont été forgés au 16e siècle à partir du participe présent des verbes francisés, selon les règles de la dérivation de langue française. Le mot existence est antérieur à tous les autres, servant de modèle, le Français donnant la règle. On pourrait considérer que la notion d’existence est enveloppante de toutes les autres sans se réduire à aucune d’entre elles: l’existence est « le fait d’être », les autres définissent « les processus, les modalités de l’être ». Le Z sépare, alors, le produit de ses facteurs, le complexe de ses composants; le dérapage du doigt ne fait que révéler la trace fossile d’une orthographe et d’une dure réalité anciennes !
Mais je dois céder à l’insistance du correcteur d’orthographe qui s’énerve et souligne de rouge la moitié de mon texte!!!!!!!

(Texte écrit en Mars 2005 pour la Gazette de la librairie “A plus d’un titre”, Lyon).

Illustration du TREBUCHET

Author : Gilbert — 1 May 2007

Trebuchet

(Texte page VERBE) Dessin de Quentin

L’Histoire selon Hegel

Author : Gilbert — 22 Apr 2007

Une Leçon d’Histoire de HEGEL.

Pour Hegel l’Histoire est le long processus de la Connaissance du Monde et de la Conscience de Soi. Ce cheminement est celui de la Découverte de la Notion de Liberté. Il distingue la Liberté chez les Orientaux pour qui un seul individu est libre, le despote; en Grèce et en Rome où seuls sont libres les citoyens et les patriciens contre les esclaves et les plébéiens. Avec l’avènement de l’ère chrétienne c’est l’homme en tant qu’Homme qui est libre si bien qu’ils le sont tous. Voici un extrait de ” Leçons sur la philosophie de l’Histoire” de Hegel, traduit par Jean Gibelin pour la Revue de Philosophie n°8.

………..“. Chez les Grecs s’est d’abord levée la conscience de la liberté, c’est pourquoi ils furent libres, mais eux aussi bien que les Romains savaient seulement que quelques-uns sont libres, non l’homme, en tant que tel. Cela, Platon même et Aristote ne le savaient pas ; c’est pourquoi non seulement les Grecs ont eu des esclaves desquels dépendaient leur vie et aussi l’existence de leur belle liberté; mais encore leur liberté même fut d’une part seulement une fleur, due au hasard, caduque, renfermée en d’étroites bornes et d’autre part aussi une dure servitude de ce qui caractérise l’homme, de l’humain. – Seules les nations germaniques sont d’abord arrivées dans le christianisme, à la conscience que l’homme en tant qu’homme est libre, que la liberté spirituelle constitue vraiment sa nature propre; cette conscience est apparue d’abord dans la religion, dans la plus intime région de l’esprit; mais faire pénétrer ce principe dans le monde était une tâche nouvelle dont la solution et l’exécution exigent un long et pénible effort d’éducation. Ainsi, par exemple, l’esclavage n’a pas cessé immédiatement avec l’adoption du christianisme; encore moins la liberté a-t-elle aussitôt régné dans les États, et les gouvernements et constitutions ont-ils été rationnellement organisés ou même fondés sur le principe de liberté. Cette application du principe aux affaires du monde, la transformation et la pénétration par lui de la condition du monde, voilà le long processus qui constitue l’histoire elle-même. J’ai déjà appelé l’attention sur la différence entre ce principe comme tel et son application, c’est-à-dire son introduction et sa réalisation dans la réalité de l’esprit et de la vie: c’est une détermination fondamentale de notre science et il faut s’en bien souvenir. Comme on a provisoirement souligné ici cette différence par rapport au principe chrétien de la conscience, la liberté, elle s’établit aussi essentiellement pour le principe de la . liberté en général. L’histoire universelle est le progrès dans la conscience de la liberté – progrès dont nous avons à reconnaître la nécessité..”…..

Le trébuchet de Quentin

Author : Gilbert — 14 Apr 2007

Quentin, l’aîné de mes petits enfants, très fort en math et en thème (1ère S) a récemment proposé à son prof et à sa classe une étude, un mémoire sur le thème “modèles et modélisations”, il a choisi, pour répondre à la question posée, le recours au modèle du “trébuchet”, sous le titre : “Peut-on envoyer avec un engin d’hier une bombe d’aujourd’hui ? “. Bonne question d’un lycéen amoureux des mathématiques plus que de l’Art Militaire ! Rappelons- nous que, jadis, les officiers artilleurs, spécialistes en balistique, étaient les meilleurs mathématiciens des Grandes Ecoles de Guerre. Et puis provoquer l’anachronisme est propre à stimuler la réflexion ! l’humour est souvent partie prenante de la créativité. Et le modèle est bon !
A la lecture du Rapport j’ai tout de suite apprécié son introduction qui s’appuie sur une analyse du mot “trébuchet”, on ne peut, en effet, séparer le mot de la chose, ainsi on donne à celle-ci ainsi une dimension historique et à celui-là une étymologie significative.
….”Le trébuchet est une ancienne machine de guerre dite à contrepoids. Elle sert principalement à détruire les murs des châteaux forts en y lançant d’énormes boulets. Introduite en France au XIIe siècle elle est utilisée jusqu’au XVIe siécle. Le mot “trébuchet” vient de l’occitan “trebucca” qui signifie “qui apporte des ennuis” mais dans l’Occitanie médiévale la trebucca était aussi une balance de précision. Il est constitué d’une verge liée à un contrepoids articulé. A l’autre extrémité de la verge se trouve une poche dans laquelle était placé un projectile.”…..
Pour moi qui ne connaissais le trébuchet que comme balance de précision des orfèvres et des officines,et dans l’expression “monnaie sonnante et trébuchante”. ! Je découvre,étonné que le trébuchet était cousin de la catapulte et ancêtre de la “grosse Berta” ! Et le voilà sacré modèle de balistique, changement de poids, de dimension et de destination !
Quentin et ses camarades (Matthieu et Simon) ont d’abord calculé les éléments théoriques du trébuchet puis tenu compte de la réalité. Le frottement de l’air par exemple que l’on peut de prime abord négliger prend consistance, oppose une résistance et amortit la trajectoire parabolique. Il faut chiffrer, calculer, (on sent poindre la question de l’aérodynamisme qui n’est pas à l’ordre du jour). Ils ont construit une maquette ( 60 cm environ d’envergure), ils ont établi un protocole expérimental, fait varier les paramètres ( la masse du contrepoids par exemple), confronté les résultats avec ceux des logiciels qu’ils ont découverts et exploités. La réponse à la Question posée ne les surprend pas : on peut obtenir des résultats compararables à ceux d’un petit canon actuel avec un trébuchet de plusieurs dizaines de Km d’envergure et un contrepoids énôôôrme ! ! ! !
Merci à Mars et Vulcain, l’artillerie a su s’appuyer sur ces fondamentaux balistiques et exploiter tous les progrès des explosifs, depuis l’invention de la poudre. Si viser c’est toujours tracer une corde à la trajectoire parabolique, les conditions initiales sont totalement différentes, mais en définitive toujours la GRAVITE l’emportera et des ENNUIS le trebucca toujours apportera ! !

NB-Le verbe “trébucher est un composé hybride du latin tra-, trans- “au-delà” (avec l’idée de déplacement) et du francique “buk “tronc du corps”. Trébucher c’est se déplacer et brutalement buter du pied contre un obstacle, l’élan acquis puis rompu précipite le haut du corps en une chute soudaine sans parade mais non sans dommage ! Si l’on sait que “trébuchet” désignait aussi un “piège à bascule pour les petits oiseaux”. entre chute et piège on comprend que les occitans aient aussi donner au mot l’acception (effective) de porteur, générateur d’ennuis ! !
Pour la petite histoire le verbe “trébucher” a acquis la transitivité grâce à la fonction de peser : je “trébuche le pour et le contre” alors que “j’ai trébuché sur ce sentier caillouteux” ! !

Noam Chomsky

Author : Gilbert — 4 Apr 2007

NOAM CHOMSKY, des problèmes aux mystéres

Le célèbre linguiste américain (né en 1928) fait partie de ma mythologie personnelle surtout le Chomsky des années 50-60 (âge d’or de la linguistique). L’effervescence de l’époque autorisait toutes les audaces. C’est ainsi qu’il rompit avec le structuralisme du Pape Saussure, opposant “les performances de la parole” aux notions de “structures de la langue”. Influencé par la logique et la cybernétique, il étudie les relations entre les concepts et leur réalisation dans le discours? Ne voulant pas se réduire au descriptif il élargit son domaine d’études à la psychologie et aux rapports entre parole et pensée. C’est ainsi qu’il est conduit à prendre des positions morales et politiques ( fin des années 60). et à devenir un “intellectuel” (sens français) anarchiste et engagé. Le savant, alors, le cède au militant. Il devient très critique voire violent à l’endroit de la philosophie française qui se caractérise par la grandiloquence et l’autosatisfaction, “Star system” de pacotille. Lacan, Derrida sont ridicules et infantiles. En 1988, Noam Chomsky condamne sans appel dans “Language and Politics” ces intellectuels qui vont d’une absurdité à une autre. Dès lors Chomsky intervient en politique et quitte le champ scientifique. Il s’éloigne du Champ de la Connaissance des Capacités humaines pour s’intéresser à ce que les hommes font de leurs Capacités, des problèmes vers les mystères.

“Les éditions de l’Herne ” annoncent la sortie, dans la collection “Les Cahiers de l’Herne” d’une étude “Chomsky” dirigée par Jean Bricmont et Julie Franck.
Nous aurons donc l’occasion d’en reparler et peut-être de découvrir au-delà des outrances langagières la possibilité de soumettre le deuxième Chomsky à la critique du premier ! et réciproquement ! !

Le biais du gars

Author : Gilbert — 3 Apr 2007

Au cours d’une de mes déambulations, pérégrines et hasardeuses, sur la toile j’ai découvert une thèse ( de doctorat en Sciences Humaines, Université François Rabelais de Tours) de Noël Denoyel. Ce fut d’abord l’archaïsme de son titre qui attira mon attention : “Le biais du gars”. Puis les références à la notion “d’occasion” (cf Jankelevitch), à la philosophie chinoise, son art du détour et sa pensée en creux (cf François Jullien), Je retrouvais le concept d’interferrance créatrice tel que défini par “le PERCOLATEUR HEURISTIQUE ” (voir l’article “interferrance, page “invention“).


“Cet art, un des artisans le nomme “le biais du gars”, régionalisme témoin de la métis des grecs, connaissance “oblique” des habiles. Cette intelligence pratique et rusée, ce savoir ­mémoire saisit l’occasion, la crée: “Donner le bon coup de marteau au bon endroit, et au bon moment”. On retrouve aussi dans l’art du détour chinois, cette pensée “en creux” hors de tout référentiel, qui ne justifie jamais sa démarche, mais se focalise sur le “potentiel de la situation“.

Merci à l’excellent site :”http://garde-à-vue.com” pour la découverte qu’il m’a permise.

Voyage en PeRFIDie

Author : Gilbert — 25 Mar 2007

ou l’écriture sympathique

Depuis plusieurs mois les médias (presse écrite, Toile..) se font largement l’écho du phénomène : RFID (Radio-Frequency IDentification ), sorte de “mouchard” immatériel qui permet de suivre, pister, détecter, contrôler, surveiller, le prisonnier en cavale, l’amnésique en errance, le caniche égaré, les oiseaux et les poissons dans leurs migrations, les ours dans la montagne, le skieur sur la piste noire, les colis et les paquets confiés à la Poste ou à un transporteur, d’ouvrir les portes et de donner accès à sa maison, sa voiture, à l’autoroute, de surveiller le parcours des denrées alimentaires, dans leur transport, leur stockage ( y compris dans notre propre frigo), d’organiser le système des étiquettes “intelligentes” de la Grande Distribution….. Et les cartes bancaires, vitale, et autres cartes d’identité ou d’appartenance,….
“La Mairie de Paris gère maintenant ses arbres, notamment les arbres d’alignement, via une solution à base de Tablet PC et d’étiquette RFID”.
“Aeroscout utilise notamment le Wifi pour localiser des objets ou des personnes. L’entreprise, qui comporte actuellement 90 salariés, vient de réaliser (…)”
L’institut Fraunhofer SIT a présenté une nouvelle infrastructure technique dédiée à la domotique. Baptisée Facilityboss, elle permet d’interconnecter, de commander et de surveiller l’ensemble des systèmes informatiques et des appareils électroniques”
Notre Société est exigeante de transparence et se faisant elle généralise la panoptique au grand dam de la liberté individuelle et paradoxalement de la cohésion sociale. Au nom de l’Organisation elle sous estime la fragilité des dispositifs qu’elle préconise et les détournements dont ils font l’objet . A ce propos, la CNIL ne ménage pas ses avertissements et nous sensibilise à toutes les traces que nous pouvons laisser de notre quotidien. Big Brother n’est potentiellement pas loin ! “vos données, ne vous en fichez pas”.
Sur la Toile on trouve ce témoignage qui devrait nous inciter à la vigilance :
Passeport biométrique : faille RFID.” Devant une équipe du journal anglais Daily Mail, le consultant en sécurité Adam Laurie, qui connait bien la RFID, n’a eu besoin que de 4 heures pour ‘pirater’ le nouveau passeport biométrique britannique. Cet acte a été rendu possible par la présence d’une puce RFID, qui contient toutes les données du passeport. Le passeport était pourtant placé dans une enveloppe scellée. Si pour l’instant, ce passeport ne contient que des données de base, il est par la suite prévu d’y ajouter des données biométriques. L’expert, qui a quand même réalisé 40 000 tentatives pour trouver la clef d’encryptage (il connaissait certaines données du propriétaire de la carte), estime que cette faille est extrêmement dangereuse.” (http://www.rfid.org/actualites-rfid).
A noter que la technique des RFID mobilise toutes les nouvelles technologies, des nanotechnologies aux techniques de la captation, de la numérisation, de la transmission. L’instrument se doit, pour répondre à sa mission (élargir la visibilité du monde) d’être invisible, indétectable, insoupçonnable, son domaine c’est l’insu du “tout savoir”, c’est en cela qu’il est PERFIDE.

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