Le Percolateur

Croisée

 
 

Heuristique & Sémiologique

Croisée  (Complexité, interdisciplinarité, intersection, confluence, interférence, composition, système et processus dialogique. )

Petit traité de Lugdunologie.

Author : Gilbert — 15 May 2007

Abrégé de Lugdunologie.
(Lugdunum, nom de Lyon à l’époque romaine, du Gaulois Lugd.)

«QUI NE GAGNE PAS N’EST PAS LYONNAIS» affichait, il y a quelques jours, un grand calicot au fronton de l’Hôtel de Ville, au lendemain d’une Victoire de l’OL. Formulée comme une sentence, énoncée comme un problème de logique, boursouflée et agressive, cette assertion m’ est apparue comme mal seoir à la« réserve lyonnaise» d’autant que son ostentation ravalait un symbole au rang de support publicitaire. Fallait-il, sans doute, faire la part du chauvinisme qui affecte les fans du foot, ici, comme ailleurs. Dans la bouche de Guignol le slogan aurait eu sans doute un autre sens, mais l’Hôtel de Ville n’est pas un castelet. Et puis, comment peut-on « être ou ne pas être Lyonnais» ? !
Étonné, choqué, je n’étais capable de répondre que par le recours au légendaire, au proverbial ; je me référais à « Lyon, la distante, la retenue, la discrète… » c’est à dire à ces clichés véhiculés de bouches confidentes en oreilles complaisantes, d’almanachs en cartes postales, de générations en générations, qui résistent plus au temps que la brume fameuse à la disparition des losnes , aussi installés que le saucisson de cette bonne ville et le troisième fleuve de sa région. Je restais dans le domaine des idées reçues, des poncifs, sans aller au-delà, sans essayer de creuser pour atteindre à leur travers quelque archétype ou mythe fondateur, un noyau dur. il fallait que je trouve une autre méthode pour découvrir à cette ville une Propriété première, susceptible d’expliquer sa Singularité (pas question ici d’Identité dont la quête me paraît aussi vaine que ridicule).
Il m’est apparu. à la réflexîon, “que la question se posait en terme d’écologie et non de généalogie” l’ écologie se définissant comme le système de relations avec un milieu naturel et social. L’insularité, l’enclavement, l’ adossement génèrent repli et immobilisme.
Une cité c’est un site légué par l’histoire géologique, tellurique. Lyon.c’est d’abord le confluent du Rhône et de la Saône, celui-là ouvrant à l’est, celle-cî au nord et à l’ouest et les deux réunis au Sud vers la Méditérranée~ Les fleuves s’incrémentent d’affluents qui sont autant de voies de communication par les brèches, les couloirs qu’ils creusent dans le relief. Les migrations, les déplacements de Populations, des tribus, des guerriers, des marchands… sont favorisés par cette ouverture éminemment cardinale. Le confluent est un carrefour, lieu de rencontre et d’ échange, les langages, les langues, les cultures suivent les mêmes chemins.
II semble qu’un des mots clés de notre cité pourrait être: confluence, des hommes, des choses, des mots et des idées. Cette métaphore n’est pas nouvelle, elle fait partie, de ces clichés précédemment stigmatisés, mais la confluence est souvent confondue avec la convergence. La convergence se cartograpbie, elle se pointe à une intersection de lignes, point de ralliement, objectif, but .Toutes les routes (de la croyance) mènent à Rome; toutes les routes de la monarchie absolue et de la République jacobine conduisent à Paris.
II ne s’agit pas de baguenauder, malheur aux hérétiques, aux jacques ou aux dilettantes qui empruntent les voies de la convergence. La convergence est affaire d’itinéraire et de mobilisation, de guerres et de pèlerinages. il y a du pouvoir au bout. Le chemin de Saint-Jacques est balisé, les manifs vers la Bastille ou la Nation sont encadrées. La confluence est tout autre, même si vue de Sirius elle est perçue comme une convergence. Tout change en ce lieu de passage. Elle n’est pas un terme, elle est phénomène en soi, des plus complexes, nous apprend la physique des fluides. Elle échappe aux outils de calculs les plus élaborés, à la schématisation. La confluence c’est le lieu, mouvant et flou, de toutes les rencontres, des courants, des affluences, des influences, des compositions, des flux et des reflux. de la turbulence, du brassage, des infiltrations, des résurgences, des percolations, des vortex, des malstroms, des tourbillons… La confluence accède au concept. Lyon, par son site, son histoire géologique, sa longue tradition du passage et de l’échange multiple et divers, a la propriété de confluence qui la singularise. II se manifeste ici une sorte d’esprit du lieu qui imprègne ceux qui, résidants ou passants, sont habités par cette ville. Ce phénomène ne légitime une quelconque identité mais explique son étonnante créativité dans tous les domaines de l’activité humaine.
La confluence se manifeste aussi par de la mousse, de l’écume et des bulles (!!!!!) comme celles qui érigent en emblème un slogan de tee-shirt. Ce faisant, elles deviennent souverain poncif pontifiant qui inscrit au frontispice par une sentence négative et exclusive, la circonscription sphérique du ballon d’une prétendue “lyonnitude”. Hors jeu et carton rouge.

NB- Cet article d’humeur a été écrit il y a 3 ans (été 2004). J’ai pensé le reproduire pour l’exposé rapide que j’y fais de ma conception de la construction complexe des communautés humaines, à l’encontre de la notion simpliste (et souvent meurtrière) de l’identité généalogique. Percolation !

Noam Chomsky

Author : Gilbert — 4 Apr 2007

NOAM CHOMSKY, des problèmes aux mystéres

Le célèbre linguiste américain (né en 1928) fait partie de ma mythologie personnelle surtout le Chomsky des années 50-60 (âge d’or de la linguistique). L’effervescence de l’époque autorisait toutes les audaces. C’est ainsi qu’il rompit avec le structuralisme du Pape Saussure, opposant “les performances de la parole” aux notions de “structures de la langue”. Influencé par la logique et la cybernétique, il étudie les relations entre les concepts et leur réalisation dans le discours? Ne voulant pas se réduire au descriptif il élargit son domaine d’études à la psychologie et aux rapports entre parole et pensée. C’est ainsi qu’il est conduit à prendre des positions morales et politiques ( fin des années 60). et à devenir un “intellectuel” (sens français) anarchiste et engagé. Le savant, alors, le cède au militant. Il devient très critique voire violent à l’endroit de la philosophie française qui se caractérise par la grandiloquence et l’autosatisfaction, “Star system” de pacotille. Lacan, Derrida sont ridicules et infantiles. En 1988, Noam Chomsky condamne sans appel dans “Language and Politics” ces intellectuels qui vont d’une absurdité à une autre. Dès lors Chomsky intervient en politique et quitte le champ scientifique. Il s’éloigne du Champ de la Connaissance des Capacités humaines pour s’intéresser à ce que les hommes font de leurs Capacités, des problèmes vers les mystères.

“Les éditions de l’Herne ” annoncent la sortie, dans la collection “Les Cahiers de l’Herne” d’une étude “Chomsky” dirigée par Jean Bricmont et Julie Franck.
Nous aurons donc l’occasion d’en reparler et peut-être de découvrir au-delà des outrances langagières la possibilité de soumettre le deuxième Chomsky à la critique du premier ! et réciproquement ! !

Voyage en PeRFIDie

Author : Gilbert — 25 Mar 2007

ou l’écriture sympathique

Depuis plusieurs mois les médias (presse écrite, Toile..) se font largement l’écho du phénomène : RFID (Radio-Frequency IDentification ), sorte de “mouchard” immatériel qui permet de suivre, pister, détecter, contrôler, surveiller, le prisonnier en cavale, l’amnésique en errance, le caniche égaré, les oiseaux et les poissons dans leurs migrations, les ours dans la montagne, le skieur sur la piste noire, les colis et les paquets confiés à la Poste ou à un transporteur, d’ouvrir les portes et de donner accès à sa maison, sa voiture, à l’autoroute, de surveiller le parcours des denrées alimentaires, dans leur transport, leur stockage ( y compris dans notre propre frigo), d’organiser le système des étiquettes “intelligentes” de la Grande Distribution….. Et les cartes bancaires, vitale, et autres cartes d’identité ou d’appartenance,….
“La Mairie de Paris gère maintenant ses arbres, notamment les arbres d’alignement, via une solution à base de Tablet PC et d’étiquette RFID”.
“Aeroscout utilise notamment le Wifi pour localiser des objets ou des personnes. L’entreprise, qui comporte actuellement 90 salariés, vient de réaliser (…)”
L’institut Fraunhofer SIT a présenté une nouvelle infrastructure technique dédiée à la domotique. Baptisée Facilityboss, elle permet d’interconnecter, de commander et de surveiller l’ensemble des systèmes informatiques et des appareils électroniques”
Notre Société est exigeante de transparence et se faisant elle généralise la panoptique au grand dam de la liberté individuelle et paradoxalement de la cohésion sociale. Au nom de l’Organisation elle sous estime la fragilité des dispositifs qu’elle préconise et les détournements dont ils font l’objet . A ce propos, la CNIL ne ménage pas ses avertissements et nous sensibilise à toutes les traces que nous pouvons laisser de notre quotidien. Big Brother n’est potentiellement pas loin ! “vos données, ne vous en fichez pas”.
Sur la Toile on trouve ce témoignage qui devrait nous inciter à la vigilance :
Passeport biométrique : faille RFID.” Devant une équipe du journal anglais Daily Mail, le consultant en sécurité Adam Laurie, qui connait bien la RFID, n’a eu besoin que de 4 heures pour ‘pirater’ le nouveau passeport biométrique britannique. Cet acte a été rendu possible par la présence d’une puce RFID, qui contient toutes les données du passeport. Le passeport était pourtant placé dans une enveloppe scellée. Si pour l’instant, ce passeport ne contient que des données de base, il est par la suite prévu d’y ajouter des données biométriques. L’expert, qui a quand même réalisé 40 000 tentatives pour trouver la clef d’encryptage (il connaissait certaines données du propriétaire de la carte), estime que cette faille est extrêmement dangereuse.” (http://www.rfid.org/actualites-rfid).
A noter que la technique des RFID mobilise toutes les nouvelles technologies, des nanotechnologies aux techniques de la captation, de la numérisation, de la transmission. L’instrument se doit, pour répondre à sa mission (élargir la visibilité du monde) d’être invisible, indétectable, insoupçonnable, son domaine c’est l’insu du “tout savoir”, c’est en cela qu’il est PERFIDE.

Arbitraire et mimétisme

Author : Gilbert — 3 Jan 2007

Arbitraire et mimétisme.

La linguistique postule “l’arbitraire du signe”, la déconnexion du mot et de la chose ; la poésie en découvre des parentés, des analogies, des imitations. des complicités. Là, la rigueur de la science, ici, la fantaisie ludique du poëte. Il n’empêche que Saussure le savant s’adonnait subrepticement à des recherches sur ses anagrammes qu’il ne considérait pas comme sérieuses à tel point qu’il ne les a pas publiées ( elles ne le furent qu’après sa mort ). Certes “le mot chien ne mord pas”, ni le mot chat ne griffe mais le chien ABoie et le chat MIAUle ! Il y a de l’onomatopée bien sûr et souvent aussi de la mimographie (le V de vase). Souvenons-nous du léZard de Ponge sur son mur léZardé et son Zig-Zag furtif, ce mimétisme du mot et de la chose se manifeste tout aussi bien du point de vue phonique que graphique comme le S de serpent ou le T de table,

“Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes”, la fameuse allitération de Racine joue sur ces deux registres, ces serpents là on les voit serpenter et on les entend siffler. Il y a 2 ou 3 ans nous évoquions dans ces colonnes la nostalgie hiéroglyphique du Y de Lyon que nous imaginions comme trace étymologique voire ontologique du Confluent. Claudel voyait dans le mot locomotive la représentation même de la machine, de sa cheminée, ses roues, ses bielles jusqu’à son tender et son crochet. On sait que les deux orthographes ” lis ” et ” lys ” sont autorisées, d’aucuns préfèrent LYS voyant dans le Y la représentation hiéroglyphique ou pictographique de la fleur !

Induit par la phonétique et le graphisme il y a entre les voyelles < i > et < a > un rapport de dimensions ; du TIC au TAC, du “mini” au”maxi”, du “pico” au “nano”, du “micro” au “macro”, “d’ici à là”, du “petit” au “grand”, du site au panorama, du proche au lointain. On discrimine ou on amalgame ! Dans la monstration, la désignation, CECI n’exige qu’un doigt pointé alors que CELA implique un geste plus ample; dans l’effusion, le bisou est aussi pointu et parcimonieux que l’embrassade est large et généreuse, le bris est moins grave que le casse ! On peut aussi évoquer dans le lexique scatologique, enfantin ou euphémique le pipi et le caca ! Il faut, bien sûr, savoir raison garder, si la souris est plus petite que le rat et le chat, le grizzli est beaucoup plus grand et beaucoup plus gros que ceux-ci !

Dans tout cet arbitraire il y a tout de même certaines motivations qui paraissent s’imposer ; c’est le cas par exemple du phonème < ST > qui s’entend comme un mouvement léger qui vient buter contre un obstacle bref mais impérieux, la sifflante contre la dentale ! Le graphème illustre de la même façon cet arrêt et ce redressement brutal, la sinuosité mouvante contre la stabilité géométrique. Dans les deux cas c’est le T qui l’emporte et qui compte, le S le prépare, l’annonce, le met en valeur, l’érige. Statue, station, statut, stable, posture, stature, statu quo, instance, existence, stèle, obstacle, statique, substance, nonobstant, prestance, stade, interstice, stand, constitution, estrade, solstice, …… Bon nombre de ces mots ont pour ancêtre l’indo-européen : STA = “être debout ” ! Ce qui explique que nous les partagions souvent avec nos cousins anglais et germains. Stop ! !

La Lettre, le Mot peuvent se manifester comme expressifs presque naturellement. Le texte par contre, pour s’affranchir de la contrainte linguistique, rejoindre et figurer son sens, doit se soumettre à un parti-pris graphique de l’auteur, comme dans les calligrammes d’Apollinaire ou au talent (mimique) du comédien-lecteur. Le rapprochement des voyelles et de la couleur fascine légitimement les poètes : Rimbaud voyait le A en noir et Hugo en blanc, inconciliable, à chacun sa palette, la symbolique colorée des sons reste, semble-t-il, du domaine poétique personnel, rebelle. Les langues elles-mêmes n’échappent pas à la tentation de l’approche mimétique : le soleil produit les voyelles comme il produit les fleurs, le Nord se hérisse de consonnes comme de glaces et de rochers. L’équilibre des consonnes et des voyelles s’établit dans les langues intermédiaires, lesquelles naissent des climats tempérés. (V. Hugo) . Mais c’est un poète qui parle, pas un linguiste !

Question du destin

Author : Gilbert — 3 Oct 2006

La question du destin.

Dans mon article “Le cru, le su et le voulu” (voir la webzette n°9, page Invention) j’écrivais en conclusion :

“N’est-ce pas une attitude réellement Humaniste (donc rationnelle) que de penser que l’Humanité est sortie (issue certes, mais aussi affranchie) de la jungle et de sa Loi, que de refuser l’alternative réductrice d’un obscurantisme moyenâgeux et d’un scientisme dévoyé, que de prôner une responsabilité solidaire et volontaire au sein d’une Nature dont nous partageons, l’origine, l’évolution et le destin ? Il en est de notre singularité ! Sauf à rebrousser chemin ! ” (je souligne pour cette 2ème écriture).

Des courriels, des conversations entre amis ont attiré mon attention sur l’ambiguïté de certains mots. Il me semble que je doive apporter quelques précisions.

J’adopte dans cet article une attitude humaniste (par conviction) en considérant la Création comme processus et l’Homme comme acteur responsable de sa propre création et solidaire (droits et devoirs) de celle de l’Humanité.

S’agissant de l’origine, il n’est pas question d’un instant initial ; le Big Bang (13,7 milliards d’années) lui-même n’a pas l’abscisse 0 sur l’axe du temps, ce fut une période très longue, début de l’expansion et de la dilatation de l’Univers puis de l’avènement des conditions physico-chimiques favorables à la Vie : atomes, molécules, ADN, cellules, reproduction arborescente… le Vivant. L’origine de l’Homme est peut-être là, dans cette lente émergence de la Vie. Il y a 4 millions d’années dans le règne animal apparaissait l’Australopithèque, 2 millions d’années plus tard l’Homo Habilis, puis il y a 40 000 ans l’Homo Sapiens Sapiens (homme moderne) = 4 millions d’années de sélection, d’adaptation, d’élimination, de mutation, de complexification, l’acculturation prenant le relais du Biologique, d’Hominisation à partir de L’Humus (Terre).

Telle une spirale l’Evolution se développe à partir de cette origine, point asymptotique (infiniment insondable dans l’espace-temps), au rythme du temps cosmique et selon un vecteur qui croît lentement et non-linéairement, les spires sont très serrées près de l’origine (au pas lent de l’évolution biologique) puis plus espacées (impulsion motrice et accélératrice de l’acculturation : bipédie, langage articulé, fabrication d’outils,..). Je pense pouvoir dire que la communauté scientifique : paléontologues, géologues, anthropologues, (agnostiques ou croyants), tout en souriant de mes raccourcis et de ma prétention, me donnerait quitus pour cette approche de l’origine et de l’évolution de l’Homme et de l’Humanité.

Ainsi, l’espèce humaine partage avec les règnes végétal et animal l’origine et l’évolution, soumise qu’elle est à la biologie; mais avec l’avènement et la primauté de la culture (hominisation) peut-on dire qu’elle a le même destin ? Ce mot est délicat à manipuler, en l’occurrence je lui donne le sens d’avenir, de futur, de l’ensemble des événements qui composent l’existence. Là, pas de doute, face à un cataclysme planétaire nous sommes liés et partageons le même destin ! Hormis ce scénario catastrophe, il faut bien constater que l’Homme depuis sa lente apparition (maîtrise du feu ?) s’il n’échappe pas à l’évolution biologique, utilisant ses processus il en est devenu le principal facteur par sa prédation du vivant et de la nature, des races et des essences. Il a détruit, sélectionné, éliminé modifié, par la chasse, la pêche, l’agriculture, l’élevage, l’exploitation des sols et sous-sols biaisé avec la loi de la sélection naturelle. Le plus fort c’est lui! L’acculturation a rompu une forme d’équilibre (pas tendre, certes !), la partie n’est plus partagée et les destins divergent. Le feu apprivoisé, le silex taillé, la main industrieuse, le langage articulé de la mobilisation, ont brisé avec l’évolution biologique pour une spirale à forte accélération.

Il est une autre définition de destin comme fatalité, détermination, prédestination, implication, nécessité, conséquence inéluctable, aboutissement inévitable, inscription irrévocable (mektoub), Cette acception du destin se réfère soit à un déterminisme scientifique, rationnel (la nature des choses), soit au Dessein d’une puissance (une volonté) supérieure qui décide de l’avenir, du cours de l’existence et de son terme, qui destine, qui assigne.

La Science actuelle mobilise toutes ses ressources pour répondre à la question ; que nous réserve l’avenir ? La démographie, la climatologie, la prospective écologique, la biologie-cybernétique, la génétique, la technologie du futur (nano voire pico)…. les déterminismes sont si nombreux, foisonnants et contradictoires, que l’avenir se révèle imprévisible. Chacun y va de son scénario, rarement exempt de présupposés idéologiques, philosophiques, métaphysiques ou religieux. On assiste, comme aux temps anciens à une sorte de construction de mythes qui se substituent à l’explication : spectre du cyborg, emballement cinétique de la technique et son autonomisation, part grandissante de l’irrationnel utopique, hyper-synchronisation et autorégulation de la société, substitution totale de l’évolution technique à l’évolution biologique, après la fin de l’Histoire voici la fin de l’Homme ! En fait le mot destin n’appartient pas au vocabulaire scientifique; la Science émet des hypothèses, construit des modèles, observe et expérimente, décèle des tendances, les confronte à la réalité. S’agissant du futur, elle s’exprime en terme de probabilité. Pour elle, il n’y a pas de Dessein supérieur et directeur qui ne peut relever que de la métaphysique ou de la théologie.

Médiologie

Author : Gilbert — 3 Jul 2006

Médium n°6. Extrait d’un commentaire de Daniel Bougnoux à propos du livre de Fogel et Patino : “Presse sans Gutenberg” (Grasset) :

“Dans l’ancienne presse, le lecteur affiliait son esprit à celui du journal ;sur le net, la limaille des infos s’organise selon le magnétisme de chaque lecture. En perdant leur tête ou leurs titres, les organes de la presse écrite voient leur corps dépecé et cannibalisé par ce nouveau métamédia qui n’organise pas syntaxiquement ses récits mais procède par accumulation et parataxe.
Cette fonction méta, mise en évidence par l’ouvrage, signifie traditionnellement un niveau plus abstrait, logique ou récapitulatif, un surplomb organisateur. Le journalisme prédateur d’Internet constitue un métamédia au sens où il prend son bien partout chez les autres ; sa tâche n’est pas de produire une information nouvelle, mais de rabattre, de concasser et formater toutes les infos partout disponibles sur des écrans bariolés aux couleurs splashy…”

Toujours dans “Médium” n°6, un extrait d’un article de François-Bernard Huyghe : “Aujourd’hui : Propager”

“Propager s’oppose à diffuser comme transmettre à communiquer, étant entendu que le second terme est la condition nécessaire mais non suffisante du premier. Transmettre ou propager visent à perpétuer un contenu, ce qui implique des institutions et organisations collectives, là où diffuser suppose seulement de faire parvenir une information à des récepteurs. Propager se rattache au verbe latin propagare, “reproduire par provignement” (marcottage, enraciner une tige de vigne qui reste rattachée à la plante-mère) : d’où prolonger, faire durer. Diffuser provient de diffundere, répandre. Ainsi la propagation reproduit et enfouit, quand la diffusion se contente de distribuer.
La propagation d’une onde physique ou acoustique lutte avec l’obstacle d’un milieu : elle le traverse pour s’y diluer après une certaine persistance. En télécommunications, la propagation se heurte à la réflexion, à la diffraction, à l’atténuation ; d’où une distorsion du signal émis qui fini par se perdre. Cette idée de traversée, parfois laborieuse, des éléments et des corps, est commune à toutes les propagations, même celle des maladies épidémiques.
Outre l’obstacle de la distance, une onde mentale doit vaincre la résistance du temps et notamment de l’oubli. Là où diffusion peut-être une simple affaire d’outillage, la propagation suppose des propagateurs,et, dans tous les cas des stratégies.”

MEDIUM : Revue de médiologie de Régis Debray.(ed.BABYLONE).

A propos de Gabriel Tarde

Author : Gilbert — 3 Jul 2006

Gabriel Tarde. (1843-1904),criminologue,sociologue,philosophe.

J’ai découvert Gabriel Tarde, il y a une vingtaine d’années, dans “Mille Plateaux” de Deleuze et Guattari (ed. de Minuit) : …”Hommage à Gabriel Tarde (1843-1904) : son oeuvre longtemps oubliée a retrouvé de l’actualité sous l’influence de la sociologie américaine, et notamment de la micro -sociologie”….
Il y a quatre ou cinq ans, enfin, j’ai lu son oeuvre, éditée par “Les empêcheurs de penser en rond”. Je vous en cite un court extrait, (un peu au hasard, tant elle est importante et passionnante) :

“Il ne faut pas perdre de vue, d’une part, que le besoin d’inventer et de découvrir se développe, comme tout autre, en se satisfaisant; d’autre part, que toute invention se réduit au croisement heureux, dans un cerveau intelligent, d’un courant d’imitation, soit avec un autre courant d’imitation qui le renforce, soit avec une perception extérieure intense, qui fait paraître sous un jour imprévu une idée reçue, ou avec le sentiment vif d’un besoin de la nature qui trouve dans un procédé usuel des ressources inespérées.”

Gabriel Tarde systématise cette notion d’imitation et l’étend à tous les domaines, la sociologie, l’histoire des civilisations, des coutumes, des langues, des sciences, des techniques, du progrès social,… Ses outils sont l’archéologie (remontée dans le temps) et la statistique (influence du contemporain), avec, à cette croisée, non pas un mélange ou un compromis mais une composition, une combinaison, une complexification (comme le dirait notre temps !) qui enrichit l’héritage! Tarde nous paraît très moderne, à sa lecture on pense à Bernard Stiegler, le cardinal et le le calendaire, le synchronique et le diachronique,ou à la médiologie de Régis Debray.
Un détail qui me plaît beaucoup, Tarde statisticien voyait dans les graphiques, les diagrammes une sorte d’ECRITURE hiéroglyphique dont il avait une lecture rationnelle, productive et poétique !
Et il partageait avec Reclus cette idée d’évolution fondée sur la SOLIDARITE, moteur de progrès.

Voir la note du 14/07/09.

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