Le mathématicien saura mieux le monde et même son propre langage s’il consent à la physique, le physicien connaîtra mieux les choses et même son propre outillage s’il en vient à la technique, le technicien s’il apprend l’artisanat et l’artisan s’il accède à l’oeuvre d’art. Le philosophe grammairien connaîtra mieux la langue et la connaissance et le monde s’il tolère le style et s’ouvre à ses exploits. Inversement on conçoit le progrès de l’artiste quand il se met à l’artisanat, celui de l’artisan se faisant technicien, celui du technicien… et ainsi jusqu’au bout du chemin, vers les mathématiques et la logique. Route double pour le philosophe. Et donc, en complément, le styliste n’écrit même pas sans obéissance préalable à la grammaire, sans logique ni règles de sens, syntaxe ni sémantique. S’il écrit vraiment, il y consent de fait. (Michel Serres,Le Tiers-Instruit, p.123, Folio/essais n°199).
On peut lire aussi “l’esprit scientifique” dans “Le Percolateur”.