“Nomades” ce mot est, pour une grande part, inspiré par l’usage qu’en fait Gilles Deleuze dans Logique du sens où il qualifie les significations multiples dispersées dans l’univers et dans l’esprit sans qu’il soit légitime ni possible de leur conférer une même origine, une unique source, de les faire dépendre de la transcendance d’un principe. Elles sont immanentes au cours même de la vie, de toutes les vies foisonnantes dont elles expriment, à chaque fois, en chaque point, les singularités. Une « distribution nomade des singularités ».
Il nous a paru que l’utopie, elle aussi, circule et se distribue nomadiquement, surgissant, toujours singulière, à propos de tel ou tel problème, en tel ou tel point.
L’utopie est nomade dans son déploiement et en son sens, avant même de concerner les déplacements humains du nomadisme proprement dit de l’être humain en son errance.”
Extrait de “Utopies nomades” de René Schérer, éditions : “Les Presses du Réel”. 2009
Ce site en annexe du “percolateur” ne prétend à l’exhaustivité, ni à l’autorité mais simplement à une curiosité vagabonde dans cette “bribiothèque” de notre époque, ces “bouts écrits”, ces fragments, ces éclats de Vérité voire ces coups de gueule. Kaléidoscope ou Patchwork. Du tabulaire forcément lacunaire.
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les titres
“Utopies nomades” de René Schérer
Webd'azard
Les dollars de l’art.
Merci à Édouard Glissant.
Par la pensée de l’errance nous refusons les racines uniques et qui tuent autour d’elles: la pensée de l’errance est celle des enracinements solidaires et des racines en rhizome. Contre les maladies de l’identité racine unique, elle est et reste le conducteur infini de l’identité relation. L’errance est le lieu de la répétition, quand celle-ci aménage les infimes (infinies) variations qui chaque fois distinguent cette même répétition comme un moment de la connaissance. Les poètes et les conteurs se donnent instinctivement à cet art délicat du listage (par variations accumulées), qui nous fait voir que la répétition n’est pas un inutile doublement…
SI l’errance est ainsi constitutive de Relation, elle a affaire avec la philosophie, avec la philosophie de la Relation, qui serait non seulement un art de l’errance mais à la lettre une philosophie errante, dont les pôles et les points d’échange se déplaceraient sans cesse….
Extrait du dernier ouvrage d’ Édouard Glissant : “Philosophie de la relation” NRF, Gallimard, mars 2009.
Soi parmi les autres ou l’idiorrythmie selon Barthes
Ne déçoit pas qui veut. Dieu lui-même ne saurait revendiquer la toute-puissance en ce domaine. C’est toutefois à chaque fois qu’il a déçu qu’il a le plus donné à penser. Roland Barthes, on s’en convaincra par la lecture de ces notes de cours du Collège de France : Comment vivre ensemble comme par celle de ses ouvrages, ne suit pas la pente facile d’une pensée fluide, déployant méthodiquement, par son ordre scolaire et ses fausses clartés, l’illusion du savoir vrai, universel, impersonnel et anonyme. Il décevra donc les attentes de plus d’un lecteur. Déception salutaire pour le travail de la pensée. Et tout particulièrement quand il s’agit de réfléchir sur le Vivre Ensemble, thème qui concentre et précipite les utopies, les mystifications et les constructions idéologiques. Faire valoir ascèse et rigueur dans l’examen des formes de cohabitation possibles avec l’autre, c’est là, sans doute, toute l’ambition d’un orateur qui explore son sujet depuis les exigences intérieures qui le travaillent. Ainsi découvre-t-il, au détour d’une pérégrination intellectuelle autour des pratiques monacales du mont Athos, le mot qui lui permet de donner corps à l’idée, au fantasme qui l’habite, d’une proximité à l’autre qui ne soit pas distance d’avec soi-même (idiorrythmie). La richesse de son cheminement et tout le poids de son effet de vérité, Barthes les doit à l’enracinement littéraire de son propos. Du haut de sa chaire du Collège de France, il ne prêche, ne professe ni ne prophétise mais plonge dans notre culture pour faire remonter à sa surface les multiples manières dont la question du lien à l’autre y opère en-deçà des discours savants et rationalisants.
Ces “Cours et séminaires” au “Collège de France” furent édités en 2002 par les Éditions du Seuil.
Amin Maalouf dénonce “le venin identitaire”
Chrétien d’Orient, exilé du Liban, mais avant tout laîc et universaliste, l’auteur des “identités meurtrières” dénonce dans son nouvel essai : “Le dérèglement du monde”, le poison du communautarisme. En ces premières années du XXIe siècle, le monde présente de nombreux signes de dérèglement. Dérèglement intellectuel, caractérisé par un déchaînement des affirmations identitaires qui rend difficiles toute coexistence harmonieuse et tout véritable débat. Dérèglement économique et financier, qui entraîne la planète entière dans une zone de turbulences aux conséquences imprévisibles, et qui est lui-même le symptôme d’une perturbation de notre système de valeurs. Dérèglement climatique, qui résulte d’une longue pratique de l’irresponsabilité…
L’humanité aurait-elle atteint son “seuil d’incompétence morale” ? Dans cet essai ample, l’auteur cherche à comprendre comment on en est arrivé là et comment on pourrait s’en sortir. Pour lui, le dérèglement du monde tient moins à une “guerre des civilisations” qu’à l’épuisement simultané de toutes nos civilisations, et notamment des deux ensembles culturels dont il se réclame lui-même, à savoir l’Occident et le Monde arabe. Le premier, peu fidèle à ses propres valeurs ; le second, enfermé dans une impasse historique.
Un diagnostic inquiétant, mais qui débouche sur une note d’espoir : la période tumultueuse où nous entrons pourrait nous amener à élaborer une vision enfin adulte de nos appartenances, de nos croyances, de nos différences, et du destin de la planète qui nous est commune. “Le dérèglement du monde” d’Amin Maalouf est édité chez Grasset. Rappelons que cet essai est écrit en Français et que Amln Maalouf est un excellent Artisan et un Militant convaincu de notre Langue.
Des langues comme produits naturels.
Considérez les langues ; voyez si elles ne possèdent pas tous les caractères que nous avons reconnus jusqu’ici aux produits de la vie. Elles ont leurs périodes d’enfance, de jeunesse, de virilité, de vieillesse, de décrépitude; et elles ont dû nécessairement avoir, avant l’âge du foetus que nous pouvons observer pour quelques-unes, un état rudimentaire. ou embryonnaire, soustrait à nos observations.
Elle se développent par percolation, par l’élaboration de matériaux adventices, par la fixation progressive de formes primitivement indécises, par la distinction croissante de ce qui était originairement confondu. La forme, c’est-à-dire la structure grammaticale, y persiste comme l’élément essentiel, tandis .qu’elles perdent des matériaux (c’est-à.dire des mots) et en acquièrent d’autres, et que ces matériaux eux-mêmes subissent dans leur constitution et dans leur valeur de continuelles altérations. Quand le système des formes grammaticales est viscéralement atteint et que la langue ne peut plus vivre, les matériaux qui la composaient s’en détachent pour entrer dans la composition d’un autre organisme. Arborescence, développement rhizomatique, semence, greffe, bouture, provignage, pollinisation,,….( Pardon à Messieurs Bouveresse , Sokal et Bricmont mais je me réfère à Cournot, M Mûller et à beaucoup d’autres ! ) voir le percolateur.
Gilbert Simondon, une œuvre transductive
L’œuvre de Simondon aura influencé et inspiré des auteurs tels que Jean Baudrillard (Le Système des objets, 1968), Georges Friedmann (La Puissance et la sagesse, 1970), Abraham Moles (Théories des objets, 1972) ainsi que Gilles Deleuze (L’image et le mouvement) et Bernard Stiegler (La technique et le temps). Son œuvre n’est pas sans résonance avec celle de Leroi-Gourhan (Milieu et technique). Elle n’est pas non plus sans parenté avec le mouvement auquel appartient « le groupe Ethnotechnologie » qui donnera naissance à la revue « Culture techniques » et plus tard les revues « Terminal » et « Les cahiers de Médiologie » de l’emblématique Régis Debray. Ceci peut être vu comme une évolution transductive qui est un concept simondonien, voire une percolation.
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