Le Percolateur

Webzette n° 8

 
 

Heuristique & Sémiologique

Webzette n° 8  (Avril 2006 )

Médiologie

Author : Gilbert — 3 Jul 2006

Médium n°6. Extrait d’un commentaire de Daniel Bougnoux à propos du livre de Fogel et Patino : “Presse sans Gutenberg” (Grasset) :

“Dans l’ancienne presse, le lecteur affiliait son esprit à celui du journal ;sur le net, la limaille des infos s’organise selon le magnétisme de chaque lecture. En perdant leur tête ou leurs titres, les organes de la presse écrite voient leur corps dépecé et cannibalisé par ce nouveau métamédia qui n’organise pas syntaxiquement ses récits mais procède par accumulation et parataxe.
Cette fonction méta, mise en évidence par l’ouvrage, signifie traditionnellement un niveau plus abstrait, logique ou récapitulatif, un surplomb organisateur. Le journalisme prédateur d’Internet constitue un métamédia au sens où il prend son bien partout chez les autres ; sa tâche n’est pas de produire une information nouvelle, mais de rabattre, de concasser et formater toutes les infos partout disponibles sur des écrans bariolés aux couleurs splashy…”

Toujours dans “Médium” n°6, un extrait d’un article de François-Bernard Huyghe : “Aujourd’hui : Propager”

“Propager s’oppose à diffuser comme transmettre à communiquer, étant entendu que le second terme est la condition nécessaire mais non suffisante du premier. Transmettre ou propager visent à perpétuer un contenu, ce qui implique des institutions et organisations collectives, là où diffuser suppose seulement de faire parvenir une information à des récepteurs. Propager se rattache au verbe latin propagare, “reproduire par provignement” (marcottage, enraciner une tige de vigne qui reste rattachée à la plante-mère) : d’où prolonger, faire durer. Diffuser provient de diffundere, répandre. Ainsi la propagation reproduit et enfouit, quand la diffusion se contente de distribuer.
La propagation d’une onde physique ou acoustique lutte avec l’obstacle d’un milieu : elle le traverse pour s’y diluer après une certaine persistance. En télécommunications, la propagation se heurte à la réflexion, à la diffraction, à l’atténuation ; d’où une distorsion du signal émis qui fini par se perdre. Cette idée de traversée, parfois laborieuse, des éléments et des corps, est commune à toutes les propagations, même celle des maladies épidémiques.
Outre l’obstacle de la distance, une onde mentale doit vaincre la résistance du temps et notamment de l’oubli. Là où diffusion peut-être une simple affaire d’outillage, la propagation suppose des propagateurs,et, dans tous les cas des stratégies.”

MEDIUM : Revue de médiologie de Régis Debray.(ed.BABYLONE).

L’hypersynchronisation

Author : admin — 25 Apr 2006

Hypersynchronisation

Laps de temps

Author : Gilbert — 4 Apr 2006

Voici un texte de Michel Scriban :

TVTV, tout va très vite avec le TGV qui nous réclame de “prendre le temps d’aller vite” !

Tant pis si je vous surprends quant à la forme écrite, mais je ne résiste pas à la tentation de vous parler du temps en n’hésitant pas à répéter le substantif.

Tant qu’à faire, je tente l’introduction avec des citations courantes entendues il n’y pas longtemps : je ne trouve plus le temps, je n’ai plus le temps de rien, le temps passe trop vite… Ces derniers temps, faute d’interlocuteurs qui disent ne pouvoir me consacrer du temps, de novembre 2005, je glisse aux listes d’attente de 2006. Entre temps, dois-je tuer le temps ? ou m’adonner à mon passe-temps ?

C’est quand même bizarre, il est dit que tout va plus vite, le train, l’avion, les communications, le téléphone, l’internet et ses messageries instantanées. A chaque moment, on serait joignable, mais on est très occupé et on n’est pas disponible ! Il y en a qui sont charrette ! D’autres débordés qu’ils soient temps plein ou mi-temps quoiqu’ils fassent de leur tiers-temps.

En somme, il y aurait deux groupes ceux qui attendent et ceux qui sont pris à longueur de temps. Il y a ceux qu’on attend et qui courent toujours pour arriver à temps mais qui sont en retard car ils ont été pris par le temps.

Tant et si bien que l’on va dire stop et s’attarder sur ce drôle de temps:

Chez nous, à la différence de nos voisins contemporains, on utilise le même mot pour le “beau” temps que pour le temps qui passe. Si l’un peut être humide ou chaud, l’autre: on peut en bouleverser son emploi et alors il faut le répartir. Si l’on affuble cet autre de l’adjectif “bon” pourtant pas si éloigné de “beau” on sait que c’est lui qui se déroule.

Il y a un siècle, est apparu l’espace-temps. La quatrième dimension permet au voyageur de moins vieillir s’il voyage comme la lumière. C’est difficile à comprendre, on vit plus longtemps mais il y a plus de mort par stress et infarctus. Les travailleurs travaillent moins mais les délais sont plus longs et les chômeurs et les précaires plus nombreux. TVPV – Tout va plus vite pour les hommes “modernes” mais pas le temps des saisons, des astres, de la gestation, de la croissance… On parle de gestion en juste à temps mais à la moindre intempérie, c’est le délai interminable.

Mais on dit aussi “il a fait son temps” et qu’il soit un objet, un animal, une personne, un parent alors là pour parler sur ces temps passés, il va falloir y passer du temps. Ne dit-on pas aussi que l’emprise du temps a eu raison de cet objet ?

Des études sont disponibles sur l’emploi du temps de notre vie prise dans sa globalité et de son évolution ces dernières décennies. Si la part du sommeil occupe plus de 8 heures de notre vie ramenée à 24h, dans le temps libre qui occupe 4h30, on voit que la TV comme les loisirs “électroniques” prend une place de choix 44% (ainsi autant en heure que le travail rémunérateur ) mais au détriment de quoi ? : des activités sociales et socialisantes (fêtes), de la lecture, du sport, des passe-temps, de la culture, … . En raccourci, tout va plus vite (TVPV) mais on laisse beaucoup de place à la TV. On voyage vite, mais arrivé à l’hôtel on allume la TV.

Si tant est que l’on puisse conclure, je perçois quelques repères pour retrouver / inventer un temps vrai celui où l’on prend le temps.

Que nous dit la musique quand elle parle de tempéré alors que notre ardeur doit parfois l’être ? On sait bien ce qu’il se passe quand on va plus vite que la musique, ou que l’on se décale de la cadence des temps.

Que nous dit le père qui consacre du temps autant qu’il le peut pour faire la lecture à ses enfants le soir et n’a pas mis de TV au bout du lit ?

Que nous dit cet ermite consacré au spirituel mais qui, comme son ordre, consacre des heures au temporel par l’accueil, le service et le travail de ses mains ?

Quels enseignements tirons-nous des conséquences des voyages hyper-rapides et des décalages horaires qui font souffrir les voyageurs du mal dit du “jet-lag” ? L’indien dans un proverbe ne nous dit-il pas que notre âme ne voyage pas aussi vite que notre corps !. Est-ce un signe des temps, mais on n’a jamais consommé autant de somnifères ! Alors que le sommeil est connu comme réparateur, nécessaire à l’apprentissage, à la créativité, à la “digestion” des acquis et connaissances.

Que faut-il tirer de l’expérience de ceux qui se dopent pour raccourcir le temps d’une épreuve mais claudiqueront lentement plus tard à la suite des séquelles de ces drogues ?

On peut être nostalgique du “bon vieux temps” mais n’est-ce pas plutôt un regard vers hier avec nos yeux d’aujourd’hui, alors que nous sommes là pour inventer le demain, l’avenir en laissant de temps en temps couler notre ennui, ce terreau fertile de notre futur.

Ce temps doit-on le subir ? Ou y a t-il une place pour la volonté et notre désir ? Doit-on laisser la place au déterminisme des oracles contemporains que sont la soumission au subconscient, la génétique ou la vision sociale et ses prédispositions ? N’est-ce pas la place laissée à l’autre qui va ouvrir nos vies cadenassées, et susciter des rêves et des désirs pour un temps nouveau et créatif en harmonie avec notre univers ? (2)

Ces lignes sont écrites à la fin du temps de l’Avent. Après-demain les jours vont se mettre à rallonger, les fêtes vont débuter. Dès lors, je ne peux que vous souhaitez du bon temps pour l’année 2006.

Michel Scriban – 20/12/2005

Géographie et anarchie

Author : Gilbert — 4 Apr 2006

Géographie et Anarchie.

La géographie fut d’abord une cartographie. La terre était plane, elle avait des angles, des fins limitatives et une mer médiane. La géographie se devait de décrire, de représenter, de dessiner les côtes, de les jalonner de repères, de refuges, (voire de repaires). On ouvrait ainsi la route des découvertes, des conquêtes et du commerce. On traça bientôt les grands chemins continentaux, ceux des caravanes du négoce (sel, épices, soie,…), ceux des armées et l’on remonta les fleuves et les rivières. La montagne ? un obstacle ou un profil d’horizon ! Sur la terre arrondie la géographie fut requise pour ortho — graphier les frontières, zoner les pouvoirs locaux et les territoires conquis, planter des drapeaux et des panneaux douaniers, sous la grille cardinale des longitudes et des latitudes vues de Sirius ou de l’Etoile Polaire convoquées par les astronomes. Triangulation, projection… Outre l’orientation, la position relative implique la distance et sa mesure. Le temps pour joindre A à B mesura la distance AB, en précisant le moyen de déplacement : à pied, à cheval, en bateau,..(mais aussi à portée de mousquet ou de canon). Les “arpenteurs révolutionnaires” mesurèrent le quart du méridien terrestre pour définir le mètre alors que les jacobins découpaient la France en départements à l’aune du cavalier. Et l’hydrologie, la géologie,…La géographie n’est-elle qu’une géométrie descriptive, une topographie ? Certes non, cet investissement progressif de notre planète a favorisé la découverte des continents et de leur peuplement. Depuis Hérodote les récits de voyage sont nombreux qui s’intéressèrent aux paysages et aux coutumes des peuplades de ces contrées lointaines, quêtes d’exotisme. Il fallait aussi conquérir, convertir, civiliser. Ces relations d’aventures quoique empreintes de préjugés, d’arrières pensées, de fantasmagories ou de préoccupations littéraires ont accompagné et complété les relevés des géographes sans partager leur souci de rigueur et d’exactitude. A noter que les botanistes, les zoologistes, ces spécialistes de la classification se distinguèrent par la précision de leurs observations.

En ce 19 ème siècle, scientiste, technologique, colonial, évolutionniste, Elisée Reclus (1830-1905) savant géographe français, d’esprit libéral et généreux, rejette la géographie instrumentalisée par le Pouvoir, il s’intéresse aux hommes, aux sociétés et à la Terre, leur maison commune. Il prône et pratique une géographie vécue, de terrain (marche, alpinisme) il parcourt le monde à la rencontre des hommes, de leurs communautés et de leurs environnements, il découvre ainsi l’étroite et complexe interaction de l’Homme et de la Nature. Elisée Reclus donne à la géographie – science de l’espace- une dimension temporelle, humaine et sociale, il élargit sa “Géographie universelle de la Terre et de l’Homme” à l’anthropologie, à l’ethnologie, à l’écologie (anachronismes!!!). La Solidarité lui apparaît comme Cause, raison de l’Humanité, moteur de son progrès, déterminante pour son avenir. Il dit ne pas savoir s’il est anarchiste parce que géographe ou géographe parce que anarchiste!! Evolutionniste avec Darwin il s’en distingue préférant la notion de coopération à celle de sélection. Pour lui l’Evolution n’exclut pas la Révolution, il s’implique fortement dans l’Histoire Sociale et Politique de son temps, le coup d’état de décembre 1851 l’oblige à l’exil en Grande Bretagne et aux Amériques, il prend une part active à la Commune de Paris en 1871, arrêté il est condamné à la déportation en Nouvelle-Calédonie, grâce au soutien de la communauté scientifique sa peine est commuée en 10 ans de bannissement (Suisse et Belgique). Il n’est pas question de réduire son oeuvre (monumentale) à une formule mais on peut, en ces temps où le monde s’interroge sur la notion de Progrès, en retenir un précepte essentiellement reclusien : “……prendre définitivement conscience de notre humanité solidaire, faisant corps avec la planète elle -même, embrasser du regard nos origines, notre présent, notre but rapproché, notre idéal lointain, c’est en cela que consiste le progrès” (Elisée Reclus; “L’homme et la Terre”).

L’interthéorique en mathématiques

Author : Gilbert — 3 Apr 2006

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Je vous propose un texte extrait de : “L’histoire et les sciences” de Pierre Raymond (Petite Collection Maspéro, 1978), qui me paraît illustrer votre article Webzette n°7, page “Invention”:

” …..le travail interthéorique est toujours nécessaire, davantage qu’une déduction abstraite, à l’essor des recherches mathématiques qu’il s’agisse du travail de l’arithmétique sur la géométrie, fondateur des mathématiques grecques, de l’algébrisation cartésienne de la géométrie, des débuts de l’analyse combinatoire chez Pascal, de la corrélation entre arithmétique décimale et algèbre des séries chez Mercator et Newton, et, tout particulièrement, des progrès du calcul infinitésimal attribués à Newton et Leibniz , permis par une longue diversification préalable des travaux mathématiques, l’habitude lentement prise d’un jeu sur plusieurs tableaux et les poussées d’unification conceptuelle…”

Proposé par Jean Marc G. de Tours. Le 24/02/06

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